Le courant vitaliste a toujours fait face aux philosophies mécanistes à travers l’histoire. Le mécanisme prend comme origine la pensée expliquant le monde comme une suite de cause à effet sans âme. Tandis que le vitalisme croît en l’énergie vitale, un principe mystique que l’on retrouve à travers différentes cultures. Voici un petit état des lieux des appellations :
Au sein des différents pays : | |
En chine | Chi ou Qi |
En Inde | Prana |
En Polynésie | Mana |
Au Japon | Ki |
En Russie | Bioplasma |
En Tchécoslovaquie | Psychotronique |
En Arctique (Inuit) | Anirniq |
Au sein des différentes cultures : | |
Dans la Grèce antique | Pneuma |
Dans la kabbale | Hayah |
Dans le védisme | Purusha |
Dans l’hindouisme | Âtman |
Au sein des différents corps de métiers : | |
Les ostéopathes | Le mécanisme respiratoire primaire |
Les radiesthésistes | La force rhabdique ou force éthérique |
A travers les propos des différents philosophes : | |
Paracelse | Munis |
Van Helmont | Magnale Magnum |
Wilhem Reich | Orgone |
Mesmer | Magnétisme animal |
Reichenbach | La force odique |
Autant de termes qui décrivent une seule et même chose : la force vitale, le souffle qui permet à la vie de se développer, d’être. Mais pour vraiment comprendre ce principe complexe et essentiel dans notre existence, il est intéressant de regarder la signification de chacun des termes et ainsi de comprendre toutes les nuances de cette énergie mystique.
Le conflit entre le matérialisme et le spiritualisme n’est pas d’aujourd’hui. On peut retrouver son origine au cours de l’Antiquité, avec Aristote et son principe moteur. Ce conflit prendra le nom de vitalisme et de mécanisme autour du 18e siècle. C’est aussi autour de cette période que le romantisme se développe en Europe, rejetant les conceptions classiques et laissant l’expression à l’irrationnel, le mysticisme, le sentiment de l’infini et de l’immensité[1]. Cette explosion artistique au sein de la littérature, la peinture, la sculpture, la musique, la politique et la danse vient renforcer ce duel historique qui continue de se perpétrer à notre époque entre matérialiste et spiritualiste.
Pourtant ce conflit n’est que l’ensemble d’une unité. Là où la science matérialiste sépare et fragmente pour analyser, puis rassemble et réunifie, les approches spiritualistes que l’on retrouve dans l’ésotérisme, partent d’un ensemble commun : Dieu, cette lumière intérieure. Celle-ci nous guide au cœur de chaque chose et nous fait ressentir sa présence en toute vie (Voir article site web). Ainsi comme l’explique Anne Jobert[2], la science a une démarche centripète (qui tend à se rapprocher du centre) tandis que l’ésotérisme à une démarche centrifuge (qui part du centre pour rejoindre l’univers.). De ce constat, cette opposition apparente se complète en réalité comme un souffle.
Ce souffle divin entre intérieur et extérieur se ressent dans la biographie des grands sages, tels que :
- Pythagore (VI siècle av. J.-C.) qui a développé la médecine, l’astronomie et les mathématiques, mais était aussi thaumaturge, philosophe et réformateur religieux (ayant d’ailleurs fondé son école de pensée mystique nommée le pythagorisme).
- Roger Bacon (1214-1294), ésotériste reconnu et représentant des sciences expérimentales au Moyen-Âge. Il fut à l’origine de découvertes en optique, mécanique, et en acoustique.
- Giordano Bruno (1548-1600) développe les bases théoriques de l’héliocentrisme et ouvre les portes à la découvertes de Galilée. Il fut brûlé pour hérésie car il proclamait haut et fort son panthéisme et ses idées révolutionnaires.
- Kepler (1571-1630), qui expliqua une rotation elliptique des planètes autour du soleil et non circulaire, croyait à une plan divin régissant le cosmos conçu par le « Grand Mathématicien » et était très versé dans l’ésotérisme.
- Descartes (1596-1650) dédia son premier ouvrage à l’ésotérisme chrétien de la Rose-Croix.
- Newton (1642-1727) consacra la majeure partie de son temps, non à la mécanique céleste, mais à l’alchimie opérative. Il établit notamment sa théorie de la gravitation en s’appuyant sur la doctrine alchimique des vertus attractives.
- Max Planck (1858-1947), prix Nobel de physique en 1918, il expliquera : « Je vois la conscience comme fondamentale. Je vois la matière comme dérivé de la conscience. Tout ce que nous parlons, tout ce que nous regardons comme existant, postule de la conscience. »[3]
- Charles Richet (1850-1935) eut le prix Nobel de médecine en 1913 pour sa découverte sur l’anaphylaxie. Il fut président d’honneur de l’Institut Métapsychique International en 1919 et président de 1930 à 1935. Il s’intéressa à la médiumnité, la télépathie, la clairvoyance, la prémonition et la psychokinèse. [4]
- Henri Poincaré (1854-1912) mathématicien, physicien, philosophe et ingénieur français, a réalisé des avancées majeures en optique et calcul infinitésimal. Il est un des précurseur majeur de la théorie de la relativité restreinte et de la théorie des systèmes dynamiques. On lui doit la phrase : « C’est avec la logique que nous prouvons et avec l’intuition que nous trouvons ».
- Albert Einstein (1879-1955) écrivit en 1950 : « Un être humain fait partie d’un ensemble, appelé par nous « Univers », une partie limitée dans le temps et l’espace. Il a expérimenté lui-même, ses pensées et ses sentiments comme quelque chose de séparés du reste, une sorte d’illusion d’optique de sa conscience. Cette illusion est une sorte de prison pour nous, nous limitant à notre désir personnel et à l’affection pour quelques personnes plus proches de nous. Notre tâche doit être de nous libérer de cette prison en élargissant notre cercle de compassion, embrassant toutes les créatures vivantes et l’ensemble de la nature dans sa beauté. Personne n’est capable de réaliser cela complètement, mais la recherche d’une telle réalisation est en elle-même une partie de la libération et un fondement de la sécurité intérieure »[5]. Une conception proche de la réalisation spirituelle bouddhiste !
- Schrödinger (1887-1961) (codéveloppeur de la mécanique quantique) était passionné par la sagesse orientale, il est notamment l’auteur de « ma conception du monde, le Véda d’un physicien. »
- Wolfgang Pauli (1900-1958) (l’un des pères fondateurs de la mécanique quantique) collabora avec Jung sur le concept de synchronicité.
- David Böhm (physicien & neuropsychologue (1917-1992)) explique la physique quantique comme une leçon de spiritualité.
Ainsi l’inspiration spirituelle de ces chercheurs de sagesse s’extériorisait dans une expiration scientifique qui matérialisait leur expérience. (Vous trouverez d’autres exemples de personnes célèbres aillant un état d’esprit universelle sous le terme de polymathe).
Ce même constat peut être fait à travers l’énergie vitale des Orientaux et la découverte des biophotons en physique (cf article du site). Ces particules de lumières utilisées par le vivant pour coordonner chacune de ces cellules au moyen d’une onde électromagnétique est une révélation scientifique, mais aussi une affirmation pour d’autres que le flux vital pourrait s’appeler communication intercellulaire et que son médiateur pourrait être les biophotons. L’effet Kirlian par exemple, découvert autour de 1939, (photo ci-dessous) a permis de visualiser ce que certains nomment l’aura (« Atmosphère immatérielle qui enveloppe ou semble envelopper certains êtres. »[6]).
Le débat s’est alors élancé et finalement les scientifiques ont tranché pour dire que ce n’était que simplement un effet Corona (« diffusion électrique autour d’un objet à travers les ions de l’air ») mais est-ce aussi simple ? Chaque corps vivant diffuse un flux électrique. Le cœur, notre courant alternatif privilégié, est commandé par un système neural nommé le nœud sinusal. Celui-ci diffuse jusqu’à plusieurs mètres autour de nous un champ électromagnétique [7]. Ainsi l’effet Kirlian visible grâce à l’injection d’un flux électrique de hauts voltages (20 à 60 000 volts) et d’une très faible intensité, n’est-il pas le même phénomène que l’aura des ésotéristes, devenue visible grâce à l’augmentation du voltage ?
Comme le décrivent les textes taoïstes : l’essence de vie est « l’espace, le ciel, ce qui met les choses en communication et les pénètre entièrement, le vent, le mouvement, les transformations, la respiration, ce qui est léger et s’élève, ce qui s’envole, se disperse, ce qui ouvre et brille c’est-à-dire la lumière »[8].
Ainsi vision matérialiste et spirituelle s’unifie dans la vision bouddhiste à travers la voie du Dzogchen, où la pratique de Trekchö consiste à trouver la lumière, l’eurêka d’Archimède, tandis que la pratique de Togal est de répandre cette lueur dans l’absolu afin que « la goutte d’eau rejoigne l’océan. ». On peut retrouver une pratique similaire au sein du soufisme (al-fana (l’extinction) & al-baqâ (la permanence)), de l’ésotérisme judaïque (la kabbale, avec les Qlippoth et les Sefira), & dans les Védas avec Samprajnata Samadhi (union avec objet) & Nirbija Samadhi (l’union sans graine)[9]… Et bien d’autres traditions dont je n’ai pas idée.
Une autre métaphore de l’universalité de cette vérité peut se faire par ce constat : au sein des Traditions ésotériques : « l’énergie originelle s’est fragmentée et polarisée en accouchant du temps & du monde manifesté. »[10]
Dans la mythologie égyptienne, de Noun, l’océan primordial est né toute chose. Pour les Grecs de l’Antiquité, c’est le chaos, le créateur originel. Les religions abrahamiques (judaïsme, christianisme, islam) indiquent Dieu comme principe créateur. La mythologie nordique voit la création naître de Ginnungagap, le néant originel. Le védisme nomme la semence originelle le « Purusha ». Dans les mythologies africaines, les Bambaras (peuple du Mali) décrivent le vide primordial comme créateur. (Les autres façons de voir les créations du monde sont souvent anthropomorphiques.)
Albert Einstein par sa relativité générale a réuni l’énergie, la matière, le temps & l’espace dans une même équation, montrant que le tout fait partie d’une unité originelle.
Ainsi le sacré rejoint le scientifique. L’un explique que tout vient de l’un et l’autre que l’un vient du tout.
Références :
[1] Ilaria Ciseri, Le Romantisme, Éditions Günd, 2004, p. 13.
[2] Science et ésotérisme, dans le dictionnaire de l’ésotérisme, de Jean Servier. Ed PUF.
[3] Schwartz, S. a. (2015). Six Protocols, Neuroscience, and Near Death: An Emerging Paradigm Incorporating Nonlocal Consciousness. EXPLORE: The Journal of Science and Healing, 11(4), p.1
[4] http://www.metapsychique.org/charles-richet/
[5] Einstein, A. Lettre datée de 1950. Dans: Schwartz, S. a. (2015). Six Protocols, Neuroscience, and Near Death: An Emerging Paradigm Incorporating Nonlocal Consciousness. EXPLORE: The Journal of Science and Healing, 11(4), p.3. https://doi.org/10.1016/j.explore.2015.04.010
[6] Larousse (2018)
[7] McCraty, R., Atkinson, M., Tomasino, D., & Bradley, R. T. (2009). The coherent heart: Heart-brain interactions, psychophysiological coherence, and the emergence of system-wide order. Integral Review, 5(2), 10–115. https://doi.org/Publication No. 06-022
[8] Maspero, H. (1971). Le taoïsme et les religions chinoises. Paris, Gallimard. p.497.
[9] Introduction aux yoga-sûtras de Patanjali : Yoga-Sara-Samgraha. (2015). Erik Sablé. Ed : Le Mercure Dauphinois.
[10] Chapitre Science et ésotérisme, dans l’ouvrage le dictionnaire de l’ésotérisme de Jean Servier. Ed PUF.
1 réflexion au sujet de “Spiritualisme vs Matérialisme, un réel clivage ?”